Le sonnet marotique : Renaissance.

Renaissance

Au cœur de mon jardin pleuvent des confettis,
Qu’un petit vent follet fait tourner en bourrique,
Donnant à la pelouse un aspect onirique,
A tel point que les eaux calment leurs chuchotis !

Les oiseaux vont par deux tracer leurs graffitis
Sur le miroir d’un ciel, tendrement féerique,
Quand le froid de l’hiver abandonne sa trique,
Tandis que les buissons lancent des sifflotis !

Des senteurs de lilas et de glycine parme
Flottent de tous côtés, pour ajouter du charme,
Au réveil d’un printemps, fier comme un jouvenceau.

Je guette désormais l’hirondelle volage,
Sera-elle présente au clocher du village
Et surtout, je l’espère, à son ancien berceau ?!

Annie

Le sonnet français : A toi mon fils.

A toi mon fils

En ce beau mois d’avril, je berce une tendresse,
Dont le doux souvenir me fait battre le cœur ;
Mon fils, quand tu naquis, je buvais la liqueur
D’un savoureux printemps œuvrant avec adresse.

Aujourd’hui je te dois bien plus qu’une caresse.
Pour la mathématique, admirable traqueur,
Après un long cursus tu t’en sortis vainqueur,
Chacun de tes succès nourrissait mon ivresse !

Toujours sobre en parole, efficace en projet,
Il t’a fallu souvent rallonger ton trajet
Pour trouver la réponse à ta quête savante !

Près de ton âme sœur, et de ta belle enfant,
Ton bonheur est réel, qu’il pleuve ou bien qu’il vente,
Quant à moi je souris à l’amour triomphant !

Annie

Le Rondel : Au point du jour.

Au point du jour

A part l’horloge de grand-mère,
Pas un seul bruit dans la maison ;
Mes pensers pleuvent à foison,
J’attrape au vol une chimère !

Magique instant, règne éphémère,
L’esprit s’enfuit à l’horizon ;
A part l’horloge de grand-mère,
Pas un seul bruit dans la maison.

Mais chacun sait que l’éphémère
Ne vit qu’un jour sa pâmoison !
Voilà soudain qu’en garnison,
Les cris du jour font leur commère,
A part l’horloge de grand-mère !

Annie

La Ballade : Fin d’hiver.

Fin d’hiver

L’hiver enfin fait une pause,
Le soleil point à l’horizon
Dès qu’une brume se dépose.
Le voile blanc de la saison
Chante sans bruit son oraison,
Tandis qu’au sol, les pâquerettes,
Offrent déjà leur pâmoison.
Sortons chapeaux et collerettes !

Puisque plus rien ne s’y oppose,
Tous les crocus en garnison,
Saluent le ciel, qui leur propose
D’accélérer leur floraison !
Dans une douce exhalaison,
Les primevères guillerettes
Ont déjà quitté leur prison !
Sortons chapeaux et collerettes !

Ainsi chaque jour je m’impose
Un petit tour sur mon gazon,
Il faut bien que l’oiseau dispose
De bonnes graines à foison,
Et sur le seuil de ma maison,
Je vois naître des amourettes
Au pied de chaque frondaison.
Sortons chapeaux et collerettes !

Adieu le poêle et son tison !
On va ranger les chaufferettes,
Et surveiller la pondaison !
Sortons chapeaux et collerettes !

Annie

Le sonnet français : La Sèvre en colère.

La Sèvre en colère

La Sèvre a transporté dans son bouillon d’écume,
Tous les secrets d’antan qui ne reviendront plus,
A moins qu’un brin d’espoir, niché dans un reflux,
Ramène son troupeau qui brusquement transhume !

Ayant quitté son lit plus tôt que de coutume,
Elle court de la berge au moindre des talus,
Fouettant sans un remords tous les bois vermoulus,
Et maints reflets cuivrés que son désir allume !

Pourquoi tant de colère en ces jours hivernaux ?
Est-ce la faute au ciel déversant ses tonneaux,
Sur un beau paysage ancré dans la noirceur ?

N’est-il temps en ces jours de lancer la poudreuse ?
Notre belle rivière, en son refrain berceur,
Chasserait le cafard de ma rime peureuse !

Annie

Le sonnet quinzain : Hiver.

Hiver

Ce matin tout est blanc, l’horizon se prélasse,
Tarde à se velouter pour flatter mon jardin,
Figé dans la torpeur d’un frisson smaragdin,
Quand la morte-saison s’admire dans la glace !

Mon petit univers que le mystère enlace,
Dans son manteau neigeux, réalise soudain,
Que le bonhomme Hiver, armé de son gourdin,
N’est pas prêt de s’enfuir même de guerre lasse !

Un silence étonnant s’empare des bois nus,
Et l’oiseau qui grelotte a gonflé son plumage,
Tous les chants merveilleux que sont-ils devenus ?

Même le vent se tait, comme on rend un hommage ;
Adieu les fleurs des champs ! Bonjour rameaux chenus !
Tous les fils de l’espoir, fragiles et ténus,

Pleurent le souvenir des beaux jours de chaumage…

Annie

Le sonnet hétérométrique : Dans l’aube rouge.


Dans l’aube rouge

Dans le feu du matin la rivière frissonne,
Le ciel est-il jaloux ?
Veut-il garder pour lui cet astre qui moissonne
Au sommeil des hiboux ?

Mais comment résister à l’aube qui s’étire
Dans son lit de roseaux,
Quand Nyx à pas feutrés s’éloigne et puis soupire,
Réveille les oiseaux ?

Laissant tomber son voile et sa noire tenue,
Elle se sauve enfin,
Craignant que le soleil ne la découvre nue !

Enivré d’un parfum,
Le jour relève alors sa chevelure blonde,
Pour se mirer dans l’onde.

Annie

Le sonnet français : Premier Noël.

Sculpture de mon amie Christiana

Premier Noël

Alba, petite fée, à l’aube de la vie,
Sais-tu que c’est le ciel et sa lune en bouton,
Qui détient les secrets du plus petit santon,
Celui qui tous les ans ranime notre envie ?

Après la longue attente, à table on le convie,
Pour admirer sa grâce et le joli peton,
Qui dépassant parfois des langes de coton,
Donne au baiser le goût d’une pêche pavie !

En ce premier Noël, on en perd la raison
Quand ton clair gazouillis enchante la maison,
Et chacun d’applaudir ta mignonne frimousse !

Devant tant de candeur même le ciel sourit,
Et le gentil berger à genoux sur la mousse,
Ajoute à son respect la foi qui s’attendrit !

Annie

Le sonnet Lozérien : Rêve de Cardabelle.

Rêve de cardabelle

J’aurais aimé cueillir la fleur de cardabelle
Au pied du lavandin ;
Peut-être savez-vous qu’il n’est pas anodin
De froisser son labelle ?

J’ai parcouru le Causse en quête de la belle,
Non pas pour mon jardin,
Je voulais simplement éloigner le gourdin,
Grâce à la sentinelle !

Hélas, je n’ai trouvé ni l’œillet grenadin,
Ni même l’asphodèle,
Charmés par le grand cœur d’un gentil baladin !

Bergère sans agnelle,
J’ai vu s’épanouir mon désir citadin
Dans l’or d’une aquarelle !

Annie

Le sonnet marotique : A toi chapelle Saint Lazare.

A toi chapelle Saint Lazare

Chapelle Saint Lazare au calme assourdissant,
Que j’aime à me lover dans le creux de ton âme,
Timide malgré tout face à la grande Dame,
Couvant son nourrisson d’un regard caressant !

Magnifique est le lieu, simple et compatissant,
Depuis qu’un grand seigneur, en guise d’épigramme,
Fit dresser ton autel pour enrayer le drame,
Quand la lèpre à nouveau brisa l’amour naissant.

Ce passé douloureux, niché dans ta pierraille,
Agite quelquefois la cloche qui déraille,
Tel un pleur étouffé par un gant de satin.

Dès que l’astre du soir fredonne sa prière,
Des parfums d’églantine et de tendre bruyère
Montent jusqu’aux vitraux flattés par le lointain !

Annie